Tribune

Interview pour la revue Polytechnique « La jaune & la rouge »

L’accès au THD est devenu un vecteur de compétitivité et d’attractivité des territoires. Analyse d’Éric Jammaron, directeur général délégué d’Axione. Il nous présente la valeur ajoutée de l’infrastructure télécom mutualisée et son rôle dans la redynamisation des régions.

eN BREF :

  • 2 500 collaborateurs
  • 550 millions d’euros de chiffre d’affaires consolidé
  • 6 500 communes déjà desservies en haut débit soit 13 millions d’habitants et 2 500 zones d’activités THD
  • 150 opérateurs client
  • 4 millions de km de fibres déployées par an
  • 24 réseaux d’Initiative Publique
  • 6 millions de prises FTTH contractualisées
  • 700 recrutements  en 2020.
Axione a vu le jour en 2003 pour répondre à la problématique de l’aménagement numérique. Dites-nous en plus sur votre cœur de métier.

Il s’agit de trouver des solutions pour répondre aux contraintes des territoires en termes de connectivité. Le principe est de permettre à tous les opérateurs télécom de proposer partout leurs meilleures offres de services sans avoir construit leur réseau jusqu’à leur client.

Concrètement, nous concevons, construisons, finançons et exploitons des réseaux télécom nouvelle génération fibre et radio, partant des datacenters nationaux jusqu’au dernier bâtiment d’un département, qui sont loués aux opérateurs pour que ces derniers délivrent leurs services à leurs clients.

Cette problématique récente est née du fait que, notamment dans les territoires peu denses, le risque lié à la rentabilité des investissements limite la présence des opérateurs. Pour répondre à cet enjeu, nous sommes partis de l’idée de mutualiser une même infrastructure télécom utilisée par tous les offreurs de services en brisant l’adage « d’un opérateur, un réseau ».

Dans quelle mesure pensez-vous que le très haut débit favorise le dynamisme économique des territoires ?

Le numérique a pris une place essentielle dans notre vie quotidienne : santé, éducation, économie, mobilité, service public… Ce constat ne cessera pas d’augmenter pour les années à venir. En effet, un grand nombre de services, publics et marchands, sont aujourd’hui plus facilement accessible par internet. Il faut donc apporter des réponses pertinentes pour que l’ensemble des territoires soient égaux devant cette réalité numérique.

Il y a aujourd’hui une contraction urbaine plus forte et un désir de s’installer dans des zones moins denses. Les individus s’attendent à avoir en 1er lieu une bonne connectivité et un bon réseau. Internet est devenu un outil de production, de commercialisation et de sociabilisation. Bâtir une infrastructure qui change la vie des gens et des entreprises donne du sens à notre projet et s’inscrit complètement dans une contribution durable à une société de progrès. Installer la connectivité parfaite et universelle, c’est donner à chacun une chance équivalente de se développer, apprendre, se soigner, vendre ou créer.

Nous nous engageons à trouver les bonnes solutions, en fonction des caractéristiques des territoires, en déployant le bon réseau au bon endroit.

Nous sommes aujourd’hui dans une dynamique européenne voire mondiale sur l’accès à l’internet dans les meilleures conditions possibles. Dans ce contexte, Axione participe à l’écriture de l’histoire de la connectivité universelle. Il faut trouver des solutions pérennes financières, techniques, organisationnelles… tout en formant les hommes et les femmes à ces nouveaux challenges qui suscitent beaucoup d’attente dans les territoires.

Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est un RIP ? En quoi peut-il être différent des autres projets de déploiement de la fibre optique ?

Le Réseau d’Initiative Publique (RIP) est une notion née d’une loi de 2004. Il y a plus de 15 ans, les opérateurs ne voulaient pas investir dans les territoires les plus ruraux. Les collectivités locales ont donc été autorisées à établir des réseaux de télécommunication pour les mettre à disposition des opérateurs. La notion d’infrastructure mutualisée était née, notion sur laquelle Axione s’est développée.

La grande différence avec le réseau d’un opérateur privé, c’est que le RIP est un service public local qui se traduit par un contrat public avec des engagements en termes de couverture, de qualité de l’infrastructure et de l’exploitation. Gérer un RIP, c’est respecter un certain nombre d’engagements d’intérêt général contractuels et pénalisables par des mesures coercitives. Par exemple, dans les territoires les plus avancés, 100 % de la population doit être éligible au FTTH[1].

[1] Fibre To The Home pour fibre optique jusqu’au logement

Tous les acteurs du THD en conviennent, le déploiement de la fibre optique est passé à la vitesse supérieure l’année dernière. Quels sont vos enjeux pour les prochaines années ?

Le premier enjeu est de continuer d’apporter LA connectivité universelle forcément évolutive dans le temps et de participer ainsi  à la dynamique d’évolution des villes et des campagnes en France et au-delà des frontières. Tant en très haut débit fibre optique (FTTH) et radio (4 et 5G), qu’en bas débit radio (Lora…). Pour cela, nous devons poursuivre notre industrialisation, maintenir notre efficacité de production tout en satisfaisant l’intérêt général porté par nos clients publics, la croissance d’abonnés de nos clients opérateurs et l’atteinte des cash flows promis à nos investisseurs. Le modèle de la mutualisation des investissements permet d’agir sur  l’intensité concurrentielle, favoriser un vaste choix d’offreurs et, de fait, la diversité des services. Nous l’avons fait depuis plus de 15 ans dans les zones les plus rurales. Et nous le faisons désormais, via notre filiale CityFast, dans les plus grandes métropoles françaises : Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux… Nous cherchons à apporter continuellement une plus grande valeur ajoutée là où nous intervenons  tant en France qu’à l’international. Le digital élargit le champ des possibles. Nous ne nous interdisons aucun axe de développement additionnel pour que le numérique soit accessible à tous.

Le financement public est-il déterminant pour le développement des infrastructures ou existe-t-il des alternatives ?

Le financement public a été très important au démarrage des infrastructures numériques, et également dans le début de l’histoire d’Axione. Historiquement, les marchés financiers ne connaissaient pas les problématiques des infrastructures mutualisées. Ils n’avaient donc pas d’appétit à vouloir soutenir des projets d’investissement sur de telles infrastructures sans intervention direct auprès des clients finaux et, de fait, avec des cash-flows dépendants de ses clients opérateurs. Désormais, ce marché est devenu un placement recherché par les investisseurs financiers. Au-delà de leur utilité publique, ces projets représentent aussi des rendements prévisibles, le risque qu’internet disparaisse étant très peu probable.

Je dirais qu’aujourd’hui, plus que le financement public,  c’est le partenariat contractuel avec la puissance publique qui fédère les différentes énergies et nous pousse collectivement à trouver des solutions dans un environnement particulièrement mouvant. Le quotidien de nos collaborateurs passe par l’innovation technique, financière, structurelle… et beaucoup de pragmatisme terrain !

En admettant que l’objectif de 92 % FTTH soit atteint à l’horizon 2025, il resterait 8 % de la population qui aurait besoin d’une solution alternative. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

Pour Axione, la cible est 100 % FTTH. Nous quittons l’ère du réseau téléphonique traditionnel. D’ailleurs, la fermeture du réseau cuivre a été annoncée d’ici 2030. La fibre représente ainsi l’alternative la plus pérenne et adaptée à son remplacement.

En parallèle, nous travaillons avec les opérateurs mobiles pour le déploiement de la 4G/5G. En effet, nous n’opposons pas la fibre aux réseaux mobiles. Ces derniers exigeront une capillarité de la fibre assez forte. Plus un territoire est équipé en fibre, meilleure sera la couverture 5G, les deux s’auto-alimentent et sont interdépendants.

Il y a une temporalité et un calendrier à gérer pour atteindre cet objectif  de la fibre pour tous. Parallèlement à ces déploiements qui demandent du temps, d’autres solutions peuvent répondre temporairement aux besoins comme le THD radio (LTE) que nous déployons dans plusieurs départements, la 4G fixe des opérateurs mobiles ou le satellite…

On évoque souvent la difficulté de recruter dans les métiers de la fibre. Qu’en est-il au sein d’Axione ?

Les collaborateurs sont au cœur de la réussite de nos activités et de la valeur ajoutée de l’entreprise. Travailler au sein d’Axione permet à chacun de participer à un projet d’entreprise, collectif, ambitieux et d’utilité publique. Nous accompagnons nos collaborateurs pour qu’ils puissent évoluer au sein de l’entreprise. Nos métiers sont très diversifiés : finance, technique, gestion, marketing, commerce, innovation, communication…  Nous considérons que chacun a une pierre à apporter à l’édifice. Axione est avant tout une aventure humaine et industrielle. La direction générale de l’entreprise est là pour motiver, accompagner et promouvoir l’intelligence collective qui constitue l’un de nos moteurs. Nous sommes toujours plus forts à plusieurs et les bonnes idées peuvent venir de chacun.

En 2020, nous avons plus de 700 recrutements prévus en France et à l’international. Nous avons de belles perspectives de carrière à offrir à nos futurs talents. Les problématiques de l’aménagement numérique et de l’équipement des territoires sont universelles. De nombreux pays sont en plein développement tels que l’Allemagne et le Royaume-Uni où la fibre optique devient un enjeu important. Nous avons sans aucun doute des choses à apporter dans ces pays. C’est pourquoi nous avons créé cette année Axione UK pour exporter ce modèle de l’infrastructure mutualisée et poursuivre l’aventure outre-Manche.

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